Les pourvoiries de la région suivent de près les tensions entre le Canada et les États-Unis. Nombre d'entre elles accueillent habituellement des touristes américains. La plupart ne remarquent aucun changement dans les habitudes de leurs clients, mais certaines ont vu le nombre de réservations des voisins du sud baisser drastiquement.
Les pourvoiries d'Abitibi-Témiscamingue sont toujours très prisées par les touristes américains, attirés par les ressources en pêche et en chasse.
Diane Koch est propriétaire de deux pourvoiries proches de Senneterre. 80 % de sa clientèle vient des États-Unis ou de l’Ontario. Pour elle, il n’y a pas de changement dans ses réservations.
La pêche c’est la pêche, ce n’est pas politique, assène-t-elle. Il y a des gens qui viennent ici depuis plus de 30 ans, 40 ans.
Le constat est le même du côté de la Pourvoirie Fern, à Duparquet. Les clients américains représentent 50 % de la clientèle estivale.
Il n’y a aucun changement. Personne n’a annulé, les dépôts ont été versés… Tout va bien. Ils ont le taux de change de leur côté
, rappelle le propriétaire, Réjean Béchard.
La pourvoirie de Wayne et Barb Moreau, sur le lac Kipawa, est clairement tournée vers une clientèle anglophone. Les Américains représentent 60 % de la clientèle.
Plusieurs de mes clients américains m’ont appelé pour me dire qu’ils venaient. Je viens de faire une réservation pour 17 Américains qui viendront en août
, rapporte Wayne Moreau.
Quatre autres pourvoiries de la région, contactées pour cet article, ne voient pour le moment aucun impact des tensions sur leurs réservations.
Mais pour certains, un changement d’habitude commence à se faire sentir.
Le président de l'Association des pourvoiries de l'Abitibi-Témiscamingue, membre du CA de la Fédération des pourvoiries du Québec, Yves Bouthillette, est propriétaire de trois pourvoiries dans la région. 90 à 98 % de sa clientèle est non-résidente, venant des États-Unis et de l’Ontario.
Mais ses réservations sont en baisse. Lors d’un salon en Pennsylvanie en février dernier, Yves Bouthillette n’a vendu aucun forfait, pour la première fois en 36 ans de carrière.
Les Américains moyens qu’on a comme clients, des cols bleus surtout, ont toujours été très attirés par l’Abitibi-Témiscamingue. Mais c’est drôle, cette année, il y avait plusieurs personnes qui étaient gênées de nous approcher, ils ne savaient pas trop quoi dire
, raconte Yves Bouthillette.
Ces salons permettent habituellement de vendre des forfaits pour l’année suivante et d’assurer ainsi une visibilité pour les saisons à venir. Yves Bouthillette constate qu’il perd cette visibilité, avec des réservations de plus en plus tardives.
Habituellement, dès mars, on n’a plus de chalet disponible pour la grosse majorité de la saison
, rapporte le propriétaire.
Pourtant, pour la saison de la pêche cette année, la chasse à l’orignal et la villégiature, le nombre de réservations dans ses pourvoiries est en baisse de 25 à 30 % par rapport à l’année précédente.
Pour Yves Bouthillette, les réticences des touristes américains à réserver cette année seraient surtout dues à des questions économiques.
Ils ont peur de leur propre économie. Ce n’est pas seulement l’économie du Québec, du Canada qui risque d’en prendre un coup, c’est l’économie des États-Unis aussi
, rappelle-t-il.
Ce nouveau risque sur la fréquentation touristique arrive après plusieurs années compliquées pour les pourvoiries, entre la pandémie de Covid-19 et les feux de forêt.
Pour Yves Bouthillette, le gouvernement aurait les moyens d’offrir plus de sécurité aux pourvoiries en leur donnant la possibilité d’acquérir les terrains sur lesquelles elles opèrent, mais également en encadrant davantage la chasse à l’orignal pour les non-résidents de la province.
2025-03-07T22:13:13Z