PRENDRE UNE ANNéE SABBATIQUE AVANT D'ENTRER à L'UNIVERSITé COMPORTE DES AVANTAGES

Lorsque Jessica Moorhouse a obtenu son diplôme d'études secondaires, elle a pensé à prendre une année sabbatique avant de s'inscrire à un programme postsecondaire. Comme plusieurs adolescentes, elle s'est intéressée aux voyages avant de s'enrôler pour plusieurs autres années d'études. 

Mais après s'être laissée convaincre par ses parents, Mme Moorhouse est entrée directement à l'université cet automne-là, pour finalement obtenir un diplôme en cinéma. 

«Il était très courant que les parents disent à leurs enfants: "oh non, ne prenez pas une année sabbatique, parce que si vous le faites, il est moins probable que vous retourniez à l'école (par la suite)"», explique-t-elle. 

Avec le recul, l'éducatrice financière et animatrice du podcast «More Money» se demande souvent si prendre une année sabbatique l'aurait aidée à comprendre ce qu'elle voulait avant de suivre un programme qui ne l'a finalement pas conduite à la carrière qu'elle a aujourd'hui. Elle pense également que cela aurait pu lui éviter l'endettement. 

«J'ai économisé le plus possible pour l'université. Mais si j'avais eu une année supplémentaire, j'aurais probablement pu éviter de contracter un prêt étudiant lors de ma dernière année d'université parce que je n'avais plus d'argent», se souvient-elle. 

Mme Moorhouse observe que de nombreux élèves sur le point d'obtenir leur diplôme secondaire (ou encore leur diplôme collégial, au Québec) pourraient tirer profit d'une année sabbatique – pas seulement pour le plaisir, mais pour des raisons financières. 

Que ce soit parce qu'ils ont des économies supplémentaires ou qu'ils ne passent pas un an à étudier quelque chose qui ne les intéresse pas, «j'ai l'impression que beaucoup de gens pourraient probablement économiser beaucoup d'argent», croit-elle. 

Un budget de sabbatique 

Des experts comme Mme Moorhouse jugent qu'une année sabbatique peut non seulement aider à déterminer quoi étudier, mais aussi donner un an pour travailler et économiser de l'argent, afin d'éviter de s'endetter plus tard — à condition de se fixer un objectif et de respecter un budget. 

Les finances sont l'une des raisons les plus courantes pour lesquelles les étudiants prennent une année sabbatique, assure Michelle Dittmer, présidente et cofondatrice de la Canadian Gap Year Association.

«Les jeunes sont de plus en plus conscients des finances associées aux études postsecondaires et de la réalité dans laquelle ils grandissent», observe-t-elle. 

Bien qu'il y ait des avantages évidents à avoir une année pour économiser, les autres avantages financiers sont plus difficiles à mesurer, estime Mme Dittmer. Les étudiants en année sabbatique ont tendance à emprunter un chemin plus direct vers le postsecondaire, à terminer leurs études en moins d'années et donc à économiser de l'argent – peut-être parce qu'ils ont eu une année de plus pour choisir le bon programme, souligne-t-elle. 

Une année sabbatique permet également aux gens de s'intéresser à différents parcours éducatifs, tels que des programmes collégiaux ou de métiers, qui peuvent souvent coûter moins cher qu'un diplôme universitaire, poursuit Mme Dittmer. 

Afin de réellement bénéficier financièrement d'une année sabbatique, Mme Moorhouse juge qu'il est important de se fixer des objectifs d'épargne et de respecter un budget. 

Pour ce faire, on doit d'abord calculer combien coûteront les études postsecondaires, des droits de scolarité aux frais de subsistance en passant par les déplacements, énumère Vanessa Bowen, accompagnatrice financière et fondatrice de Mint Worthy. 

«Avec cette clarté, on peut alors construire un plan d'épargne», indique-t-elle. 

Mme Bowen suggère de placer ces économies dans un compte distinct, comme un compte d'épargne libre d'impôt, afin de ne pas être tenté de les utiliser pour autre chose pendant l'année sabbatique. 

Même si on prend l'année pour économiser de l'argent, Mme Dittmer croit qu'on devrait quand même mettre de côté des fonds pour faire quelque chose d'amusant avec son temps, comme voyager. 

«Un gros conseil que je donnerais est de décider combien on va dépenser pour son année sabbatique avant de décider combien on va économiser», explique-t-elle. 

Sinon, même quelqu'un qui se retrouve à l'université avec beaucoup d'économies supplémentaires pourrait avoir l'impression d'avoir raté quelque chose, prévient-elle. 

Voyager plus lentement 

Si on veut passer plus de temps à voyager, Mme Moorhouse croit qu'il n'y a aucune raison pour qu'on ne puisse pas gagner de l'argent en même temps. Peut-être est-il possible de trouver un programme d'échange qui permettrait de voyager et travailler? Il existe de nombreuses autres façons de travailler tout en parcourant le monde, assure-t-elle. 

«Peut-être vaut-il mieux voyager lentement, rester à un endroit, essayer de trouver des petits boulots ou un travail à temps partiel le temps de son séjour pour pouvoir gagner de l'argent supplémentaire, puis passer à l'endroit suivant», explique-t-elle. 

Pour les gens qui envisagent de prendre une année sabbatique, il est important de déterminer quelles sont les options, poursuit Mme Moorhouse. Par exemple, si on s'est déjà fait offrir une place dans un programme d'études postsecondaires, on peut vérifier s'il est possible de reporter l'offre et regarder comment cela pourrait affecter l'obtention de bourses. Il en va de même pour ceux qui veulent prendre une année sabbatique après avoir déjà terminé une année ou plus d'études postsecondaires, précise-t-elle – mieux vaut vérifier les règles de report et parler à un conseiller pour s'assurer de ne rien manquer. 

Mme Bowen encourage également l'apprentissage des finances pendant l'année sabbatique, afin d'être mieux préparé à faire un budget avec les sommes économisées, une fois que l'école reprendra. On peut en apprendre beaucoup en parlant à ses parents, poursuit-elle, et il peut être avantageux de discuter de finances avec eux, surtout s'ils aident à payer les études.

L'année sabbatique peut aussi être utilisée pour participer à des programmes de carrière gratuits et pour demander des bourses ou des subventions supplémentaires, note Mme Dittmer. 

«Des millions de dollars ne sont pas réclamés. Et cela est dû en grande partie au fait que les élèves qui terminent leur secondaire sont trop occupés pour postuler», affirme-t-elle. 

«Alors, mieux vaut prendre le temps libre supplémentaire dont on dispose et libérer sa capacité mentale. Il faut faire des recherches, trouver les occasions, préparer une candidature hors du commun et obtenir l'argent gratuit.» 

Rosa Saba, La Presse Canadienne

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